Harvest Moon
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Harvest Moon
en 1992, sort un album du loner, dont on parle peu souvent (enfin à mon goût)
peut être à cause du titre, peut être à cause d'une période discographie en plein renouveau grunge, peut être à cause de la production parfois pléthorique de l'artiste (tellement de productions s'enchaînant à un rythme assez élevé) ou d'un tas d'autres choses...
toujours est-il qu'entouré d'alligators errants (que l'on associe à l'album Harvest en omettant leur présence sur la tournée de Time Fade Away...) neil young livre ici un album poignant, aux thèmes forts, aux mélodies entêtantes, laissant entrevoir sa part acoustique, de manière moins rugueuse, moins country qu'à l'accoutumée)....
à se demander s'il n'a pas toquer à la porte de JJ Cale pour lui emprunter sa coolitude.
Bien souvent déjà Neil Young, nous a fait le coup du retour aux sources, des enregistrements entre pote, vantant les mérites d'un rêve américain perdue depuis belle lurette dans la poussière soulevé par les illusions du far west... la campagne de Neil Young, ce n'est pas vraiment le rêve hippie incarné, des décennies avant cet album, les récoltes étaient teintées de mélancolie et de désillusion.
Pourtant, loin d'être un énième hymne aux vertes années (que l'on a jamais vraiment connues, mais que l'on plait à regretter une éternité ou deux) harvest moon possède le charme suranné des histoires contées au coin du feu (enfin, si vous n'avez qu'un feu en rond, ça devrait aller tout de même )...
Unknow legend : nous mène sur les traces d'une éternelle serveuse, que l'on imagine perchée sur des hauts talons, en mini-jupe, un tablier digne de celui qu'arbore celle choisie par supertramp... l'une de ces figures anonymes que l'artiste parvient à dépeindre avec un mélange subtil d'image d'Epinal et de franchise si touchante qu'on se prend à siffloter dans la rue en se croyant sur la route 66, guettant à perdre haleine (sisi c'est possible) l'une de ces serveuses bénie des dieux (un coca cola à la main )...
une introduction idéale pour un album résolument tourné vers une Amérique à cheval entre rêve et désabusion (comme disait le poète ^^)
From Hank to Hendrix : ou de marilyn à madonna, l'histoire de cette relation ambivalente qu'on entretien tous avec les icônes américaine, entre deux univers aussi divergents que la quintessence de la country roots et l'ovni du rock, que l'artiste entretien avec son public, que l'on entretien avec l'être aimé.... et, constat d'une fin de vie qui approche, le trait d'union entre tout cela, c'est bien évidemment un neil young plus inspiré quejamais pour une ballade chaloupée.
You and Me: mon titre favori de l'album, ony trouve un savoir faire pour l'épure digne des poètes japonais, là encore du déjà vu, du déjà entendu.... mais... voilà.... sans mièvrerie, une vision de l'amour qui a su déjouer les pièges des grands sentiments, des élans à la con qui nous pousse à sauter dans le vide, ici l'amour est l'expression d'une quiétude, d'un moment paisible, volé à l'urgence d'un présent où l'on ne se sent pas à sa place.
Une partie guitare tout en délicatesse, en harmonie, en finesse, dans un slide.pické onirique...
Harvest Moon : alors que l'on pourrait imaginer un jeune couple éloigné du monde, neil young dépeint plutôt celui d'un vieux couple qui a su, au fil des ans, faire son nid, qui a su se préserver et qui peut désormais jouir d'une liberté bien méritée (la récolter en somme, mais tout le monde aura compris)... et là, peut être pour la première fois de l'album, on comprend que l'artiste a changé son fusil d'épaule, il n'est plus ce jeune songwriter acidulé et pétillant d'antan, il a muri, se pose désormais en chantre d'un épicurisme tranquille et mordant...
War of man : est sans doute le preuve que le loup n'a pas quitté la meute ou la chasse pour autant, nous ne sommes pas ici dans les terres d'un vieux péquenot, bouseux arriéré et consanguin... cette terre il la cultivé, en prend soin... et le savoir faire et l'expérience ne sont pas antinomiques d'une hargne vigoureuse, d'une haine mordante et tenace à l'encontre de cette espèce animale qui n'a rien d'autre à foutre que de se mettre sur la gueule à longueur de temps, le tout dit sur fond d'un refrain qui enfonce chaque fois un peu plus l'âpreté d'un constat unilatéral et sans réponse possible... là encore on est loin et de l'aspect "protest song hippisante" et de la scie "je suis vieux je sais mieux que vous"... neil young n'est pas un vieux croulant il est un homme en colère... les yeux teintés de nostalgie et le poing serré.
(il me revient en mémoire une phrase de la série "the wire" disant, à peu de chose prés qu'aucun des deux camps ne gagne, l'un perd un peu moins vite et c'est tout)
One of these days : une chanson que l'on pourra facilement laisser de côté, mais qui mérite que l'on s'y attarde, ne serait-ce que pour sa thématique assez originale, on est dans la complainte des vieux amis, des moments passés que l'on ne revivra plus etc. mais l'on comprend bien vite que tout cela n'est qu'un songe creux, que l'artiste ne se voit pas encore (et sans doute jamais) comme ce vieillard radotant les mêmes sempiternelles anecdotes mille fois entendus et qui finissent pas faire office de bouées de sauvetages... cette lettre aux vieux amis... il ne l'écrira sans doute jamais...
such a woman : le titre le plus...; faible de l'album... et pourtant le titre surprenant que l'on se prend à fredonner au hasard d'un croisement ou d'une rencontrer, quelques mots légers au creux de l'oreille, une mélodie plombée par une orchestration un peu grandiloquente, comme une belle femme qui se serait trompé d'une taille pour sa robe de bal, la même impression d'incongruité... mais, au fil des écoutes on lui découvre un charme gentillet, désué... et on finit par lui proposer un slow ou deux...
Old King : c'est l'appel de la country, le rythme endiablé des danses en lignes, un taureau fougueux à dompter, un pick up et son homme qui tombe à pic au bout d'une route ocre... enfin le vieux neil enfourche son mustang sauvage et nous voilà partie à sa suite sur les ... ha ! on me signale que cette chanson parle de la mort de son chien... et qu'en prime elle pose sur cet événement un regard extériorisé presque dérangeant (Once when I kicked him, when he was bad... une chanson sur un animal de compagnie mort, ça fait très disney... mais dire au milieu qu'on le corrigeait lorsqu'il n'était pas sage, ça crée un malaise bien palpable... le tout sur fond de country rythmée... y'a de quoi en désarçonner plus d'un mon cow boy....
Dreamin' man : chanson étrange, un peu décalée, assumer de manière réaliste et claire... que l'on est tout sauf réaliste, voilà un parti pris un peu décoiffant... toutefois le titre peine à décoller, semble souffrir d'un manque de vigueur, de loufoquerie presque.. là, il y a un constat presque plaintif... le ton adulte, à la fois poignant, passéiste et d'avant garde de l'album, tombe un peu dans une forme de facilité, de figure de style imposée... à dire simplement, l'écriture ciselée de neil young ne convient pas vraiment à cette thématique, elle l'aborde peut être trop franchement, cherchant un cynisme sous jacent là où l'ironie ferait l'affaire...
Natural Beauty : voilà typiquement le genre de titre que l'on ne trouve que chez le loner, avec une phrase telle que "A natural beauty should be preserved like a monument to nature" une phrase répétitive qu'aucun francophone n'oserait et qui pourtant frappe par la justesse de son image, tout en renvoyant l'auditeur à la féminité de la nature... un moyen rapide, direct et pourtant durable... comme un upercut à l'estomac que l'on prendrait au ralenti, d'amener le lecteur dans une pose contemplative, de lui dire "regarde c'est beau", c'est le forcer à rien, en le laissant juste prendre conscience de la force implacable de la beauté naturelle...
le tout servie par une mélodie et une musique d'une rare finesse à laquelle vient se mêler l'émotion de l'interprétation en public.
Cet album ressemble par bien des points à Harvest, mais il en évite les "erreurs de jeunesse", en n'abusant pas d'une orchestration trop appuyée, en mettant en avant une approche thématique plus aboutie, plus subtile aussi, il cherche moins à plaire à l'auditeur, à faire acte d'hommage rétro actif, qu'à nous pousser à nous interroger sur nos propres motivations en cette fin de siècle, sur nos rêves, sur nos espoirs, l'amour etc... une tâche qui peut ressasser un goût prononcé de déjà vu, voir de carcasse pour certain, mais qui ici prend des allures de contes et de légendes sur fond de mélodies faisant mouche à chaque coup.
Un album, pour moi, trop méconnu de neil young...
sea U
Wu wei- Messages : 4680
Date d'inscription : 04/07/2011
Re: Harvest Moon
Je le connais mal ce disque... pas entendu depuis des décennies... je me rappelle de la proximité avec Harvest... Bravo pour cette chronique.
Re: Harvest Moon
Super chronique d'un bel album du Loner que j'apprecie beaucoup et que j'ai beaucoup écouté à sa sortie.Neil reprend encore actuellement quelques titres de ce disques sur scene,signe de l'importance qu'il lui donne.
Norbert- Messages : 6026
Date d'inscription : 26/05/2010
Age : 60
Localisation : alsace
Re: Harvest Moon
Inconnu pour ma part ca donne envie de l'écouter pour sûr, merci pour cette longue et détaillée chronique
Re: Harvest Moon
Un de mes préférés. Une qualité d'écriture et d'interprétation incroyable.
Beaucoup d'émotion aussi.
Beaucoup d'émotion aussi.
Re: Harvest Moon
ha ben ça fait plaisir de voir que cet album est autant apprécié ici bas...
j'avais découvert neil young au hasard (le nom qu'on lit un peu partout, des couv' ci et là... on finit toujours par craquer) en achetant road rock VI (je ne me souviens plus du nom exact, je n'avais pas trouvé particulièrement génial ce live un peu étrange...) c'est donc un peu à reculons que j'avais acheté harvest moon...
qui est resté deux semaines sur ma platine sans être délogé
...
et si j'avais quelques réticences à la sortie du live le reprenant en entier... j'avoue être encore sur mon séant par sa qualité
sea U
j'avais découvert neil young au hasard (le nom qu'on lit un peu partout, des couv' ci et là... on finit toujours par craquer) en achetant road rock VI (je ne me souviens plus du nom exact, je n'avais pas trouvé particulièrement génial ce live un peu étrange...) c'est donc un peu à reculons que j'avais acheté harvest moon...
qui est resté deux semaines sur ma platine sans être délogé
...
et si j'avais quelques réticences à la sortie du live le reprenant en entier... j'avoue être encore sur mon séant par sa qualité
sea U
Wu wei- Messages : 4680
Date d'inscription : 04/07/2011
Re: Harvest Moon
Fando a écrit: en achetant road rock VI (je ne me souviens plus du nom exact, je n'avais pas trouvé particulièrement génial ce live un peu étrange...)
Je te recommande "Weld" ou "Live Rust" plutôt (et surtout "Ragged Glory" en studio, amplis à 11).
Re: Harvest Moon
j'ai les deux premiers (depuis j'ai creusé mon approche de neil young) que j'écoute fort régulièrement, en revanche cela fait un bon moment que je n'ai pas mis "ragged glory".
sea U
ps : en revanche "arc" le "surplus" expérimental de "weld"... c'est moi où c'est tout de même assez inaudible, enfin... je n'ai rien contre les collages, mais là... ça picote
Wu wei- Messages : 4680
Date d'inscription : 04/07/2011
Re: Harvest Moon
Superbe chronique que je n'avais pas lu. J'aime beaucoup cet album également une paisibilité si dégage. Neil c'est un grand artiste que je connais depuis peu et son côté acoustique est souvent poignant, il a un don étonnant.
parisino- Messages : 5704
Date d'inscription : 31/05/2010
Age : 49
Localisation : Chatenay Malabry
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