Dead Man
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Dead Man
Personne ne parle de la BO de Dead Man, l'extraordinaire film de Jarmush ?
Ou bien j'ai raté quelque chose ?
Ou bien j'ai raté quelque chose ?
Zax- Messages : 139
Date d'inscription : 26/05/2012
Localisation : Paris
Re: Dead Man
non effectivement c'est un gros manque... car le film est bon et la b.o est de bonne qualité également...
nous ferais tu une petite présentation Zax ?
nous ferais tu une petite présentation Zax ?
Wu wei- Messages : 4680
Date d'inscription : 04/07/2011
Re: Dead Man
Erf et damned ! J'eu mieux fait de tourner mon clavier 7 fois avant de me mêler de c't'affaireFando a écrit:nous ferais tu une petite présentation Zax ?
Pfff, que dire ? Le film est culte certes, mais par moments tout de même un peu longuet.
La BO par contre - confiée à Neil Young en 1995 - est incroyable. Quasiment que de la guitare saturée (reverb ? d'autres effets ? J'y connais rien en gratterie).
Le résultat est à la fois sobre, voire minimaliste, râpeux à l'extrême mais surtout complètement hypnotique.
J'ose avouer que, bien que respectant beaucoup le bonhomme, je ne suis pas hyper fan de l'oeuvre de Neil Young (quoique Mirror Ball quand même...) mais là, sa musique m'emmène très loin à chaque écoute.
Voilà, comme quoi, s'il y avait encore besoin de le prouver, on ne s'improvise pas rock critique !
Zax- Messages : 139
Date d'inscription : 26/05/2012
Localisation : Paris
Re: Dead Man
Le thème de Dead Man est sublime c'est vrai. Un superbe mélange d'acoustique et d'électrique et une profondeur qui fait défaut à la période actuelle. Mais en dehors du thème je trouve le reste des titres qui composent la B.O assez anecdotique.
Re: Dead Man
1. "Guitar Solo, No. 1" 5:18
2. "The Round Stones Beneath the Earth" 3:32
3. "Guitar Solo, No. 2" 2:03
4. "Why Does Thou Hide Thyself, Clouds" 2:25
5. "Organ Solo" 1:33
6. "Do You Know How to Use This Weapon?" 4:25
7. "Guitar Solo, No. 3" 4:31
8. "Nobody's Story" 6:36
9. "Guitar Solo, No. 4" 4:22
10. "Stupid White Men..." 8:46
11. "Guitar Solo, No. 5" 14:41
12. "Time for You to Leave, William Blake..." 0:51
13. "Guitar Solo, No. 6" 3:22
Là où un Miles Davis avec ascenseur pour l'échafaud semblait opposer son lyrisme de musicien noir amoureux en france au ton tragique du film pour sortir des notes langoureuses, comme happées par les émotions ; Neil Young n'est plus un jeune homme depuis quelques siècles déjà.
Sa croix, son malheur ils les portent sur un dos usé et fatigué depuis des décennies, des décennies à porter le poids d'une carrière, le poids des tournées, le poids d'une image, le poids de responsabilité... ce n'est pas un artiste fini, vide ou amorphe.. c'est un homme fatigué qui se calfeutre dans un costume d'icône trop grand pour lui. Du moins ça doit être proche de l'image que Jim Jarmush ce fait de cet immense artiste, il le voit au-delà de la notoriété, au-delà de son aura de star, il le voit tel qu'il est au fond de lui... sur le bord du précipice, il commence à se faire vieux, à être blasé, sans être rouillé.
Et cette image paradoxale, à la fois triste et revigorante, qui forme la nostalgie, cette image hante le projet de "western crépusculaire" de Jarmush..; il a tout, l'idée, la poésie, la fin d'un monde... pour contribuer non à le détruire, mais à renouveler ce mythe de l'ouest, à lui insuffler une vie nouvelle.
Et c'est des puanteurs d'un immonde glauque, des ténèbres des sables mouvants de l'âme prête à être digérer par l'Histoire.. que va sortir l'improvisation de Neil Young. Il se dépouille de cette carapace de vedette, de ce scaphandre isolant qu'on lui fait porter de gré ou de force..
Il plonge au plus profond de lui, pour se sortir les tripes... pour créer une mixture étrange, un brouet aux relents de charogne...
ô, pas la charogne des bas côtés, pas la charogne qui empuanti la pièce jusqu'à vous faire trembler les os de dégoûts...
non de ce genre de charogne ci :
Une Charogne
Rappelez-vous l'objet que nous vîmes, mon âme,
Ce beau matin d'été si doux:
Au détour d'un sentier une charogne infâme
Sur un lit semé de cailloux,
Les jambes en l'air, comme une femme lubrique,
Brûlante et suant les poisons,
Ouvrait d'une façon nonchalante et cynique
Son ventre plein d'exhalaisons.
Le soleil rayonnait sur cette pourriture,
Comme afin de la cuire à point,
Et de rendre au centuple à la grande Nature
Tout ce qu'ensemble elle avait joint;
Et le ciel regardait la carcasse superbe
Comme une fleur s'épanouir.
La puanteur était si forte, que sur l'herbe
Vous crûtes vous évanouir.
Les mouches bourdonnaient sur ce ventre putride,
D'où sortaient de noirs bataillons
De larves, qui coulaient comme un épais liquide
Le long de ces vivants haillons.
Tout cela descendait, montait comme une vague
Ou s'élançait en pétillant
On eût dit que le corps, enflé d'un souffle vague,
Vivait en se multipliant.
Et ce monde rendait une étrange musique,
Comme l'eau courante et le vent,
Ou le grain qu'un vanneur d'un mouvement rythmique
Agite et tourne dans son van.
Les formes s'effaçaient et n'étaient plus qu'un rêve,
Une ébauche lente à venir
Sur la toile oubliée, et que l'artiste achève
Seulement par le souvenir.
Derrière les rochers une chienne inquiète
Nous regardait d'un oeil fâché,
Epiant le moment de reprendre au squelette
Le morceau qu'elle avait lâché.
- Et pourtant vous serez semblable à cette ordure,
A cette horrible infection,
Etoile de mes yeux, soleil de ma nature,
Vous, mon ange et ma passion!
Oui! telle vous serez, ô la reine des grâces,
Apres les derniers sacrements,
Quand vous irez, sous l'herbe et les floraisons grasses,
Moisir parmi les ossements.
Alors, ô ma beauté! dites à la vermine
Qui vous mangera de baisers,
Que j'ai gardé la forme et l'essence divine
De mes amours décomposés!
Les Fleurs du mal, Charles Baudelaire
la plainte monotone inéluctable lente croassante que Neil Young improvise sur sa guitare saturée, résonne de ce type de beauté.. d'un sentiment profond de malaise...
on se sent attiré par le vide, de la même manière que l'artiste sent la pesanteur de l'âge l'attirer inexorablement.
L'écoute de cet album laisse alors l'auditeur soit indifférent (il faut bien le dire c'est une thématique risquée pour le réalisateur comme pour le chanteur) soit totalement envoûté par cette mélopée tenant de la transe, mais dépouillée de toutes artifices, de toutes mise en valeur.
Dead Man aborde le sujet de la mort, du destin... or, il ne s'agit pas uniquement d'accepter cela... il faut parvenir à le sublimer par l'art... c'est ce que parvient à faire Neil Young ici en proposant sa proche démarche vers la mort : reptilienne, brisée, éreinté... mais fière et sauvage.
Après, sans être sensible au Jarmush et à son univers, sans prendre plaisir au mélange : chanson/extrait du film... et sans être d'humeur à noyer son chagrin dans une bouteille d'alcool fort sur la lande irlandaise par une nuit de pleine lune... cet album peut être un calvaire
Wu wei- Messages : 4680
Date d'inscription : 04/07/2011
Re: Dead Man
Voilà, c'est exactement ce que je voulais dire
(sauf que j'ai du mal à imaginer le calvaire et pourtant il le faut bien)
(sauf que j'ai du mal à imaginer le calvaire et pourtant il le faut bien)
Zax- Messages : 139
Date d'inscription : 26/05/2012
Localisation : Paris
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